Servant Leader1Robert K. Greenleaf (1904-1990) affirme que « la première capacité du servant-leader est l’écoute » (in The Servant as Leader). Pourquoi ? Est-il un doux rêveur, lui l’ancien patron d’AT&T le géant de la communication aux USA ? Probablement pas…

Dans son esprit, le leader doit se mettre au service des besoins profonds de ses collaborateurs afin qu’ils soient satisfaits. Il est important de distinguer besoin d’envie ou de caprice. Une envie est superficielle et passagère. Ma fille a envie d’une glace… cela peut devenir un caprice si elle fait une colère pour l’avoir. A contrario, un besoin est quelque chose de vital, à nourrir pour que je puisse donner le meilleur de moi-même.

Répondre aux besoins

Par exemple : si j’ai déjà une forte expérience dans mon métier, j’ai probablement besoin d’autonomie, là où d’autres plus jeunes dans la fonction auront besoin de réassurance. Comme leader il est donc important d’être à l’écoute de mes collaborateurs afin de répondre concrètement à leur besoin spécifique. Soit en définissant un cadre suffisamment large d’action pour le premier, soit en prévoyant des points de suivis fréquents et réguliers avec le deuxième. Ainsi je nourrirai leur besoin – qui est susceptible d’évoluer au fil du temps et je leur permettrai de fonctionner en mode optimum. La question de la motivation peut ainsi trouver une réponse. Quand je fonctionne en mode « effort », à rebours de mes besoins, je m’épuise et je ne suis plus motivé. L’inverse est vrai.

Ensuite, si l’on suit la pensée de Greenleaf, qui a écrit un deuxième ouvrage (The Institution as Servant), la configuration de l’organisation dans laquelle j’évolue donne une réelle primauté ou pas à l’écoute.

Une pyramide inversée pour remettre le client au centre

Lorsque l’organisation est purement pyramidale (en fonctionnement top-down) l’essentiel est de bien transmettre l’information aux niveaux hiérarchiques inférieurs pour s’assurer d’une parfaite exécution. Lorsqu’elle est plutôt matricielle avec des niveaux fonctionnels, hiérarchiques entrecroisés, beaucoup de son énergie passe à communiquer en interne, à définir les périmètres de chacun, à réguler les conflits de territoire, à clarifier le « qui fait quoi », à définir des processus toujours plus nombreux et complexes… bref la communication consiste à surtout bien faire circuler l’information en interne. Mais quid de l’extérieur et quid du client ?

Des entreprises de plus en plus nombreuses ont aujourd’hui compris l’impérieuse necéssité de remettre le collaborateur au contact et au service du client. Réorienter l’énergie sur le client… qui fait vivre l’entreprise, il en est la véritable finalité. Le cash n’est alors qu’une résultante, c’est-à-dire un résultat.

Cela conduit parfois à l’instar de ce qu’a fait Vineet Nayar avec HCL en Inde (in Les employés d’abord, les clients ensuite), à inverser la pyramide. Le collaborateur opérationnel est à l’écoute du client, le manager à l’écoute des collaborateurs, le dirigeant à l’écoute des managers… La qualité primordiale du manager devient donc d’écouter ses équipiers qui sont au contact du client et de ses attentes.

Des services supports à l’écoute

Dans cette configuration de pyramide inversée, les services supports – dont c’est la vocation initiale – se mettent au service de l’opérationnel en leur demandant : qu’attendez vous de moi ? comment puis-je faciliter votre travail ? auxquels de vos besoins puis-je accéder ? etc.

Ils cessent ainsi de mettre les opérationnels au rapport à travers du reporting (qui sert la plupart du temps à rassurer la hiérarchie et/ou pire à justifier son poste) ou bien à travers l’imposition de politiques diverses à déployer de façon impérative et urgente et qui parfois sont en total décalage avec le vécu terrain ou complexifie des choses simples au départ. L’exemple type est le formulaire en « 12 pages » de l’entretien annuel à faire absolument pour telle date…. si on demandait au manager terrain de le formaliser les choses seraient souvent plus pragmatiques. Certaines entreprises comme Chateauform’, ou même comme une grande banque (Handelsbanken) ont poussé la chose jusqu’à permettre aux opérationnels d’évaluer la qualité du service rendu par les services supports ou centraux ; et s’ils n’étaient pas satisfaits de leur permettre d’externaliser. Magnifique.

L’écoute apparaît vraiment comme une capacité clé dans une organisation agile qui met la satisfaction client au centre de ses préoccupations.